fleur bleu

Elle gondola dans sa chaise à bascule,
Les mains rivées
Les ongles nacrés enfoncés loin devant elle
Par la fenêtre elle s’émeut d’une fleur simple

Je suis de la fleur le pétale, rose et doux
Et du vent, le souffle chaud et caressant
Ainsi dans cette maison, je suis la chaise
Douce et confortable
Suis-je riche ? Suis-je pauvre ? Seule ou entourée ? Sauvage ou cultivé ?
J’ai du mal à le définir
Les mots des autres me reviennent et ne vont pas
Je suis lasse, je découvre mon nouveau visage


Son corps a perdu l’armement farouche, ses gestes la légèreté
Une fragilité apparente, presque inhumaine colore ses traits sauvages

Fleur de ville ! Au milieu d’ici je cherche le soleil
Et parfois la lune seulement m’apporte la lumière dont j’ai besoin
Elle me dessine alors une robe harmonieuse


Ainsi que dans le crépuscule ses traits s’adoucissent,
Les cheveux deviennent plus clairs,
Il est moins choquant de voir sa silhouette si peu volumineuse
S’enflammer dans un geste vif et précis
Elle allume une cigarette

Je me réveille d’un long sommeil
Qui a duré la moitié de ma vie
Je découvre des ombres que je me suis toujours cachées
Hécate, déesse feu-follet de sorcière ou fée dans la nuit
Me fait honneur
Le fard et les images tombent
Il me reste plus que celle
Que je suis maintenant


La fleur entre les pavés ferme ses feuilles pour la nuit
Elle ne l’avait pas quitté du regard

Maintenant tu vas quitter cette terre
Avec leurs grandes batailles
Tu va nous quitter et devenir fleur de nouveau
Pourtant il n’y a pas de bras pour te bercer
Ni d’épaules pour te porter
Ni des larmes pour te soulager
Il n’y a que le rêve que tu appelles
Je n’ai plus envie de le refuser
Lumière tu te tournes vers lumière
Rêve vers le rêve
Ta nuit enferme la nuit qui me touche
En toi je peux me voir telle que je suis
Une fleur sauvage entre les pierres de la ville
Car ta solitude est mon regard
Et ta peine mon sourire


Enfin la seule lumière qui reste autour d’elle
Vient du point rougeâtre de sa cigarette
Quant alors la porte s’ouvre
Une ombre telle un sourire signe ses traits et les mots lui reviennent

Et le pétale tombe dans ta main
Le souffle ébouriffe tes cheveux
La chaise, tu t’y assois
De la vie, je suis ton rêve
Que je fais parfois
J’habite ton paysage
Laborieux et fatigant
Je conduis nos jours
Aux abîmes de jadis
Ou tu me poursuis


(C) milja willems 22 mai 1985

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